L'observateur du Vendredi 3 septembre 2004

A Dourlers, Guy Lobeau est un passionné d'histoire

"Ma démarche résulte d'une curiosité familiale"

 

A travers deux ouvrages, Guy Lobeau a exploré la Seconde Guerre Mondiale dans ses spécificités régionales.

Enfant du «baby-boom»,Guy Lobeau a exploré les années sombres d'une guerre qu'il n'a pas connue.Son ambition ? Relater l'histoire régionale et nationale à travers le vécu de ses parents et d'autres acteurs locaux, leur histoire et leurs témoignages. «je suis parti d'albums photo», raconte l'auteur Une démarche a priori anodine qui a entraîné ce professeur d'anglais et de français en lycée professionnel sur les chemins de l'histoire. Sur la base de ses recherches, Guy Lobeau a écrit deux ouvrages relatant les combats de Sambre-Avesnois.A travers la correspondance de ses parents et de nombreux autres documents d'époque, il n'explique pas, il expose. Evitant au maximum les pièges de l'interprétation, il laisse aux lecteurs le loisir de poser un regard neuf en face d'informations brutes.

Histoire defamille
Originaire de l'Avesnois, Guy Lobeau nourrit depuis toujours une véritable passion pour la période tourmentée que représente la Seconde Guerre mondiale. Un intérêt auquel le vécu familial n'est pas étranger: «j'étais d'autant passionné par cette époque que mon père était militaire de carrière et qu'il s'est retrouvé dans le secteur attaqué par la division blindée de Rommel, en mai 1940», souligne l'auteur. Une percée allemande suite à laquelle le père de Guy Lobeau fut fait prisonnier près de Maubeuge. «J'ai voulu savoir comment cela s'est passé, en dehors de son propre récit».Une soif de vérité qui le conduit à mener des enquêtes approfondies, dans son entourage, puis «toujours plus loin».Car dans la sphère familiale «on parlait peu de ces choses-là.Mes parents préféraient rapporter les moments plus joyeux de leur vie» .Un choix qui ne satisfait pas la curiosité de Guy Lobeau.Bien au contraire.


Témoignages et documents
Pour mener à bien son entreprise, l'auteur s'est tout d'abord penché sur les écrits d'époque.«J'ai lu tout ce qui a été écrit sur cette période et en particulier des articles de journaux relatant des histoires individuelles». Durant quatre ans, ses recherches se seront traduites par quatre mille coups de téléphone et deux cent cinquante rencontres. Si la démarche et celle d'un amateur,c'est néanmoins avec «une rigueur et un souci d'authenticité qu'il accomplit sa «quête». «Je suis allé aux détails. Cela m'a demandé de la patience car beaucoup de témoignages du passé étaient dans quelques coins de grenier, n'attendant qu'à être exhumés, sans compter qu'il fallait inspirer confiance pourqu'on me les prêtat. Dans certains cas, il aura fallu attendre entre un et deux ans. En ce qui concerne ma recherche de photos et d'illustrations, les choses n'étaient pas plus simples . J'ai d'abord employé des albums de famille.Pour les combats de 1940, il est très difficile d'en trouver, sauf côté allemand, mais il faut les acheter et cela augmente le prix de revient du livre. Alors je me suis limité en nombre dans le premier ouvrage. Pour le second, il m'a été plus facile d'en obtenir car à l'arrivée des libérateurs, cette fois, de nombreux clichés ont été pris. Il faut savoir les emprunter» .De la patience, beaucoup de rigueur et un soupçon de diplomatie, autant d' «armes» auxquelles Guy Lobeau a eu recours pour ranimer toujours plus pertinemment une réalité que le temps tente d'effacer.
Deux ouvrages pour un conflit
Devant l'importante quantité d'informations rassemblées, l'idée de les partager s'est naturellement imposée. «A travers mes recherches, beaucoup de gens peuvent rapprocher leur expérience avec ce que je raconte et pour les jeunes, elle leur permet de découvrir. Mon travail a ensuite consisté à recouper les informations afin de reconstituer une histoite sans inventer quoi que ce soit» De ce travail titanesque est né «Maudite soit la guerre !». Un livre en deux tomes, avec une première partie consacrée à la période 1938-1940, relatant la drôle de guerre et les combats de mai 1940, et un second volume, plus récent, consacré, lui, à la période 1940-1946. «Je raconte cette fois la captivité, l'Occupation, la montée des mouvernents de résistance, en particulier celles de l'OCM et du FTP, la Libération, tant en Sambre-Avesnois qu'en Allemagne, par les Américains ou par les Russes, ainsi que les lendemains de guerre. Tout cela sans complaisance».
L es ouvrages sur la guerre 39-45 ne manquent pas et l'éclairage régional qui caractérise celui de Guy Lobeau réduit considérablement l'étendue géographique du public concerné. Dans ces conditions, la recherche d'une maison d'édition devient plus complexe. Mais cette difficulté, l'auteur a su la contourner en ayant recours à l'auto-édition. «Cela convient parfaitement bien aux livres d'histoire régionale. De plus cela permet d'assumer soi-même la promotion et la diffusion dans la zone concernée. Cela représente un pari car il faut s'autofinancer.Et cela représente un lourd investissement personnel et même une véritable aventure». L'auto-édition témoigne également d'une réelle implication de l'auteur pour son projet. Après neuf années et deux volumes, rassemblant respectivement 400 et 570 pages, un troisième volume n'est pas d'actualité pour l'auteur qui cependant a déjà d'autres projets d'écriture.


François Clay